Peu d’épisodes historiques sontaussi fortement ancrés dans la mémoire américaine que la guerre de Sécession, la plus meurtrière del’histoire des États-Unis (entre 600 000 et 700 000 personnestuées) et même du continent américain. La bataille deGettysburg en est un moment-clé.
La guerre deSécession
Les grandes causes de laguerre
Ce conflit a vu s’affronter legouvernement américain et treize états sécessionnistes du Sud desÉtats-Unis, regroupées au sein de de la Confédération desÉtats-Unis, de 1861 à 1865. La division du pays, untraumatisme national durable, résultait des divergences entre leNord et le Sud sur la question de l’esclavage. Enréalité, au cours des décennies ayant mené à la Guerre, lesdifférences entre les deux régions s’étaient creusées, relativementà l’«institution particulière»(l’esclavage) mais également aux questionséconomiques – le Sud agricole et libre-échangiste contrele Nord industriel et protectionniste – et culturelles.
Une guerre qui seprolonge
Lorsque le conflit éclate en 1861,la supériorité du gouvernement américain (l’Union) paraîtécrasante. Les confédérés ont moins de 10 millions d’habitants dontle tiers d’esclaves contre plus de 20 millions pour leuradversaire. Les grands bastions industriels se situent tous au Norddes États-Unis. Le Sud, lui, n’a qu’une seule des dix plus grandesvilles américaines, la Nouvelle-Orléans, occupée par l’Union dès1862.
Contre toute attente, laGuerre de Sécession se prolonge toutefois, et voit se succéder desaffrontements sans cesse plus meurtriers. Si dans l’ouestdu pays, la progression des troupes nordistes est inexorable, surle front Est, les confédérés ont l’avantage jusqu’en 1863. Toutesles tentatives d’invasion de l’État de Virginie par l’armée del’Union se soldent par des échecs, souvent humiliants face àl’armée de Virginie du Nord du général Robert EdwardLee.
Début 1863, l’armée du Potomac, del’Union, s’apprête toutefois à nouveau à passer à l’action avecplus de 100000 hommes dirigés par le général JosephHooker.
Voir ici : la Boston Tea Party, 16 décembre1773
La bataille deChancellorsville et l’invasion de la Pennsylvanie par lesConfédérés
L’offensive commence à la fin dumois d’avril 1863. Hooker pense avoir de bonnes chances del’emporter, sa supériorité numérique sur Lee étant écrasante. Eneffet, le commandant sudiste a détaché un corps d’armée entier,dirigé par son principal lieutenant le général James Longstreetafin d’assiéger Suffolk, une ville occupée par l’Union. L’armée duPotomac se divise en deux pour franchir le Rappahannock en deuxpoints et prendre son adversaire en tenaille. Pourtant, dèsle 1er mai, l’attaque nordisteéchoue.
L’attaque de flanc deJackson
À l’Est, le général Sedgwick, troptimide, n’ose pas entrer en action contre une force confédéréepourtant très inférieure en nombre servant d’écran à Lee. Celui-cipeut alors concentrer la majeure partie de ses 60000 hommescontre le principal corps de bataille de Hooker plus à l’Ouest. Lelendemain, le 2 mai, le IIe corps confédéré, dirigé par le généralThomas «Stonewall» Jackson se détache de la force deLee afin de mener une puissante et audacieuse attaque de flanccontre le IXe corps fédéral qui est rapidement décimé. Hooker estdès lors encerclé sur trois côtés tandis que Sedgwick se montretoujours timoré.
La retraite deHooker
Pour autant, la bataille ne semblepas jouée. Lee n’a pas assez d’hommes pour attaquer Hooker surtrois flancs et doit rapidement recentrer son dispositif. En outre,la nuit du 2 mai, le général Jackson est mortellement blessé par unde ses hommes au cours d’une patrouille, désorganisant l’arméeconfédérée.
Les jours suivants, celle-ci nepeut que lancer des assauts frontaux contre l’Union qui se soldentpar de lourdes pertes dans les deux camps et la situation sestabilise. Toutefois, privé d’un de ses corps, presque anéanti, etalors que l’aile gauche de Sedgwick, qui s’est finalement mise àavancer, est rapidement arrêtée, le général Hooker décide de mettrefin à son offensive et d’entamer une longue retraite vers le Nord àpartir du 6 mai contre l’avis de ses généraux.
Il a perdu près de 20000hommes contre environ 12000 sudistes. En proportion de sesforces, ses pertes sont toutefois inférieures à celles deLee.
La bataille de Chancellorsville :victoire à la Pyrrhus ?
Bien qu’elle soit souventconsidérée comme la plus belle victoire du commandant de l’armée deVirginie du Nord du fait de ses manœuvres audacieuses, labataille de Chancellorsville a en réalité contribué à saignerl’armée confédérée dont les réserves en hommes sont trèsinférieures à celles de l’armée fédérale. Comme au même moment, surle front occidental, le général Grant est en train de lancer sonoffensive contre la ville de Vicksburg dans le Mississipi, menaçantde couper la Confédération en deux, la situation de cette dernièren’est guère brillante.
Toutes ces données justifient la décision de Lee de lancer sa propre offensive à l’Est,en envahissant la Pennsylvanie. La défaite décisive del’armée du Potomac doit faire peser une lourde menace surWashington, la capitale fédérale, et convaincre le gouvernementaméricain de négocier avec la Confédération. Lee décide deréorganiser son armée pour cette offensive. Si le généralLongstreet, de retour de Suffolk, conserve le commandement de sonpremier corps, celui-ci est réduit en nombre, tandis que le corpsde Jackson est divisé en deux. Les généraux Ewell et A.P Hillprennent respectivement le commandement des IIe et IIIe corps del’armée de Virginie du Nord. Celle-ci est complétée par le corps decavalerie de JEB Stuart.
La poursuite à travers laPennsylvanie et la concentration des forces àGettysburg
Les deux armées ennemies sereplient en suivant des chemins parallèles. Toutefois, Lee, situéplus à l’Ouest, est séparé des troupes de Hooker par des montagnes,tandis que JEB Stuart mène la cavalerie sudiste dans un raidaudacieux mais peu utile à l’Est de l’armée du Potomac. Enconséquence, le principal corps de bataille confédéré ne disposeque de très peu de renseignements sur son adversaire.
Le IIe corps d’Ewell, fer de lancede l’invasion du Nord, avance jusqu’aux environs d’Harrisburg, lacapitale de Pennsylvanie. Excédé par la timidité de Hooker, leprésident Abraham Lincoln le remplace le 28 juin par le général George G. Meade, l’un de ses commandants decorps.
Apprenant subitement que l’arméede l’Union se rapproche de la sienne, Lee décide de concentrer seshommes à Cashtown et rappelle le général Ewell et son corps. À cestade, il ne désire pas engager de bataille. Mais lorsque le 30juin, des forces du IIe corps sudiste d’A.P Hill se rapprochent dela ville de Gettysburg, elles notent l’arrivée d’une petite forcefédérale au sud de celle-ci, une unité de cavalerie dirigée par legénéral Buford. Le matin du 1er juillet, Hill, qui n’aaucune idée des positions des principaux corps de l’armée duPotomac, décide d’engager ses hommes dans un combat contreBuford.
1er juillet,premier jour de la bataille de Gettysburg : les deux armées entrenten contact
L’assaut de Hill par le Nord-Ouestest suivi par une avancée d’Ewell et de son IIe corps depuis leNord. Buford, qui ne dispose que d’une division, comprend toutefoisla nécessité de retarder l’armée sudiste. Après un combatdifficile, il tient suffisamment longtemps pour être renforcé parle Ier Corps de l’Union dirigé par le général Reynolds. Ce dernier,qui tient la gauche du dispositif fédéral, décide d’engager lecombat, une décision qui rend inévitable un affrontementmajeur entre les deux armées.
Il est rapidement tué par untireur d’élite confédéré mais son corps tient jusqu’en débutd’après-midi au Nord-Ouest de Gettysburg. À sa droite, face àEwell, le XIe corps défend le Nord de la ville, mais les positionsde l’Union, mal organisées, ne peuvent tenir longtemps. Ewell etHill parviennent à les mettre en déroute et à occuperGettysburg.
L’erreur d’Ewell
Heureusem*nt pour l’armée duPotomac, le général Winfield Scott Hanco*ck parvient à rallier lesdeux corps en fuite et à les faire prendre position sur deuxcollines situées plus au Sud, à Cemetery Hill et Culp Hill. Sonobjectif, qui lui a été assigné par Meade en personne, est de lestenir jusqu’à l’arrivée des cinq autres corps d’infanterie et dechoisir un lieu favorable pour leur déploiement. Face à lui, Ewell, satisfait du résultat de la journée, ne pense paspossible de prendre d’assaut Cemetery Hill malgré sasupériorité numérique. Cette décision, lourde de conséquence,laisse à l’Union une position stratégique autour de laquelle ellepourra organiser sa défense.
Bilan de la premièrejournée
Le premier jour de la bataille deGettysburg se solde ainsi par une victoire confédérée, maisincomplète. Les quelques 25000 hommes engagés ducôté du Nord ont pu se replier en bon ordre grâce à l’action dugénéral Hanco*ck et ont occupé de solides positions au Sud de laville pour la journée suivante. Lee espère toutefois que l’arrivéesur le champ de bataille de son meilleur corps, le Ier, dirigé parLongstreet et qui n’a pas été engagé le premier jour pourra fairela différence avant que l’Union n’ait consolidé ses défenses. Enrevanche, du fait de l’absence de son corps de cavalerie, legénéral n’a que des informations très parcellaires sur les forcesqu’il doit affronter.
Dans le campnordiste, Hanco*ck informe le général Meade qu’il disposede l’avantage du terrain grâce à l’occupation de Cemetery Hill etCulp Hill. Les Ier, XIe et XIIe corps s’y placent sous les ordresrespectifs des généraux Newton, Howard et Slocum. Hanco*ck place sonIIe corps en position centrale sur Cemetery Ridge mais la lignequ’il met en place coupe celle constituée par les deux collinescitées précédemment.
Cela signifie que l’armée duPotomac n’est pas disposée en ligne mais en crochet, ce qui permetd’utiliser les lignes intérieures pour que les différents corpspuissent rapidement se renforcer mutuellement en cas deproblème.
En outre, bien que légèrement plusnombreuse que l’armée de Virginie du Nord, elle occupe un terrainplus réduit ce qui permet une plus grande concentration de sesforces. À l’extrême sud, à la gauche d’Hanco*ck, Meade place le IIIecorps du général Daniel Sickles. Le Ve corps, dirigé par GeorgeSykes, n’est pas encore arrivé sur le champ de bataille mais ildoit constituer la réserve de l’armée du Potomac. Le VIe corps deSedgwick est situé encore plus loin du combat.
Voirici : l’histoire du Mont Rushmore
Le 2 juillet, l’Unionrésiste aux assauts sudistes sur tous lesfronts
Le plan de batailleconfédéré
Au matin du 2 juillet, le GénéralLee convoque ses généraux afin de discuter du plan de bataille.Contrairement au général Longstreet qui estime préférable detourner l’armée du Nord afin de menacer ses lignes deravitaillement et de la forcer à attaquer, le général Ewellrecommande à son supérieur de tenir Gettysburg, en arguant d’unepossible baisse de moral en cas d’abandon de la ville.
Lee tranche en sa faveur. Ilestime en effet que la gauche du dispositif nordiste (défendu parSickles) n’a pas eu le temps de se déployer correctement etpourrait être vulnérable à une attaque du Ier corps de Longstreet.Dans le même temps, A.P Hill et Ewell doivent mener des attaques dediversion contre Cemetery Ridge au centre et Culp Hill àl’extrême-droite de la position de l’Union. Longstreet ne peutqu’obéir mais il ne dispose alors que de deux divisions, dirigéespar les généraux Hood et McLaws, la troisième, commandée par GeorgePickett, n’étant pas encore en position. Il décide dès lors dereporter l’assaut.
La désobéissance deSickles
En face, le général Sicklesdemande à Meade la permission d’avancer son IIIe corps sur PeachOrchard et Devil’s Den, deux collines situées devant lui et offrantune meilleure position défensive. Le général en chef refuse,estimant à juste titre que cela l’obligerait à défendre un saillantau front beaucoup trop étendu, et dont le flanc serait menacé parune petite colline située au Sud, Little Round Top.
À la stupéfaction générale,Sickles désobéit pourtant et avance son corps de sa propreinitiative, l’exposant fortement aux attaques sudistes. Lorsqueceux-ci commencent vers 16 heures, les confédérés pensent que PeachOrchard et Devil’s Den sont inoccupées. McLaws se lance à l’assautde la première colline et Hood attaque la seconde.
Combats sur lescollines
Lorsque le Ier corps de l’armée deVirginie du Nord tombe sur les troupes de Sickles, lasurprise est totale. Hood demande aussitôt à Longstreetl’autorisation de contourner les forces nordistes afin de lesprendre à revers mais son supérieur refuse. De violentscombats s’engagent sur Peach Orchard et Devil’s Den, tandisqu’au même moment, Ewell et Hill lancent leurs propres assauts surleur section du front.
Le général Meade a bien comprisque son aile gauche risquait d’être anéantie et il ordonne à sesréserves de converger vers cette partie du champ de bataille. Defait, le corps de Sickles est saigné à blanc sur Peach Orchard etDevil’s Den tandis que sur son flanc gauche, la division de Hood,se lance à l’assaut de Little Round Top afin de tourner sonadversaire. Seule l’intervention d’une brigade du Ve corps deSykes, dirigée par le colonel Strong Vincent, permet de défendremiraculeusem*nt la colline. Au cours des combats sur Little RoundTop, Vincent lui-même est grièvement blessé, tandis que le colonelJoshua Chamberlain se distingue par une charge héroïque qui luivaudra la médaille d’honneur du Congrès.
Ce succès obtenu de justesse nepeut empêcher l’anéantissem*nt du IIIe corps deSickles, ce dernier étant par ailleurs grièvement blessé,mais il laisse à Meade suffisamment de temps pour organiser lesecours de son aile gauche.
L’attaque deLongstreet
En effet, l’offensive d’Ewellcontre Culp Hill, lancée peu après l’attaque de Longstreet au Sud,a rapidement piétiné. Si une partie du bas de la colline a pu êtreoccupée par les troupes confédérées, celles-ci se sont ensuiteheurtées à une forte défense du XIIe corps de Slocum. Au centre, ladivision sudiste de Richard Anderson mène une attaque de diversioncontre Cemetery Ridge qui ne donne aucun résultat. Conscient que lepoint de contact décisif se situe bien au Sud, Meade, ne cesse d’yenvoyer des renforts, venus du XIIe corps à la droite de sondispositif, du IIe corps au centre et du Ve corps en réserve.20000 hommes en tout sont déplacés vers l’aile gauche del’armée du Potomac afin d’arrêter l’attaque deLongstreet.
Les combats qui se prolongentjusque tard dans la nuit, atteignent des sommets deviolence. Le général Hood lui-même est grièvement blesséau bras, dont il perdra l’usage. Lorsque, vers 22h30, les combatscessent, le Ier corps de Longstreet est finalement repoussé, dejustesse.
Bilan de la deuxièmejournée
Le 2ème jour sesolde ainsi par un échec confédéré. Si Lee estime quel’assaut sur l’aile gauche de Meade a failli réussir, une partie deson armée est démoralisée. Le général Longstreet estime que labataille de Gettysburg ne peut plus être gagnée, l’Union ayant eule temps de renforcer ses positions, et que l’armée de Virginie duNord doit manœuvrer afin de trouver un terrain plusfavorable.
Pourtant, l’adversaire a subi delourdes pertes. Le IIIe corps fédéral a virtuellement cesséd’exister. Les unités des autres corps qui ont participé à ladéfense de la gauche de l’armée du Potomac ont aussi subi delourdes pertes. D’après l’historien Noah Trudeau, celles-cis’élèvent en effet à environ 10000 hommes contre 7000 dansles rangs confédérés.
Le conseil de guerre deMeade
Le général Meade est satisfait durésultat du deuxième jour de la bataille. Toutefois, dirigeantl’armée du Potomac depuis moins d’une semaine, il ne peutignorer l’avis de ses généraux.
La nuit du 2 juillet, il organiseainsi un conseil de guerre avec tous ses chefs de corps et quelquesautres généraux de haut rang. Il leur demande de répondre à trois questions:
- l’armée du Potomac doit est-ellerester sur le terrain ou se replier vers une autre position,apparemment plus favorable?
- Doit-elle attaquer et camper surses positions?
- Si cette dernière optionl’emporte, combien de temps, doit-elle attendre?
Hanco*ck, Howard, Slocum et lesautres généraux choisissent de rester à l’unanimité. Il estégalement décidé de demeurer en position défensive, afin d’attendreun autre assaut de Lee.
En se fondant sur lacorrespondance de Meade, la plupart des historiens estiment que cedernier avait déjà décidé de demeurer sur place mais que ce votelui a permis de gagner la confiance de ses chefs decorps, qu’il ne commandait que depuis quelques jours.Quoiqu’il en soit, la nuit permet aux nordistes de renforcer leurspositions avec de nouvelles unités. Du côté sudiste, la division dePickett est la seule unité du corps de Longstreet à n’avoir subiaucune perte, tandis que certaines autres, du corps d’A.P Hill sontégalement en état de se battre. La cavalerie de JEB Stuart estfinalement arrivée sur le champ de bataille le soir du 2 juillet,mais sans impact sur les opérations.
Le 3 juillet et la chargede Pickett
Contrairement à Meade, le généralLee prend seul la décision de lancer une attaque contre lecentre de l’Union durant le troisième jour de la bataillede Gettysburg. Il s’oppose en cela à Longstreet qui pense, à justetitre, que les divisions engagées dans un tel assaut devrontavancer à découvert durant trop longtemps, s’exposant aux tirsnordistes. En outre, Lee pense que Cemetery Ridge a été en largepartie vidée de ses forces pour défendre l’aile gauche de l’arméedu Potomac là où son lieutenant estime que la majeure partie du IIecorps fédéral y est solidement positionné et que Meade peutfacilement y envoyer des réserves en cas de percéesudiste.
Cependant, Longstreet ne peuts’opposer à son général en chef qui lui demande de préparer uneoffensive menée avec 13000 hommes des divisions des générauxPickett (Ier corps), Trimble (IIIe corps) et Pettigrew (IIIecorps). Le général essaie d’abord de transférer la responsabilitéde l’assaut sur les épaules d’A.P Hill, dont deux divisions doiventêtre engagées, mais il finit par céder devant l’insistance deLee.
Un assaut meurtrier
L’attaque doit être précédée d’unbarrage d’artillerie et procéder en échelon jusqu’à Cemetery Ridge,position tenue par le général Hanco*ck. Comme l’avait correctementprédit Meade, l’attaque se dirige directement sur les forcescommandées par le général Gibbon, au centre du dispositif du IIecorps. Elle débute vers 14 heures après la fin du barraged’artillerie qui s’est révélé peu précis. Lorsque le généralPickett lui demande l’autorisation de faire avancer sa division,Longstreet, incapable de prononcer un mot, se contente de hocher latête.
Très rapidement, les forcesconfédérées subissent de tirs d’enfilade venue de canons fédérauxpositionnés sur Cemetery Hill au Nord et Little Round Top au Sud. Leurs rangs sont déjà décimés au moment de déclencher lacharge, à portée de fusil du IIe corps. À la gauche dePickett, les divisions de Pettigrew et Trimble sont arrêtées pardes tirs très intenses et ne peuvent même pas atteindre les lignesde l’Union. Trimble lui-même est grièvement blessé.
La division de Pickett progressedavantage, mais perd rapidement son premier chef de brigade, legénéral Garnett. La brigade du général Kemper finit par êtreimmobilisée et son commandant blessé. En définitive, seulesquelques centaines de sudistes de la troisième brigade de Pickettcommandée par Lewis Armistead, parviennent à entrer en contact avecl’ennemi. Armistead demande à ses hommes de retourner certains descanons capturés contre les nordistes, mais il n’a pas de munitionpour les faire fonctionner.
Au même moment, de nouvellestroupes de l’Union arrivent et colmatent rapidement la brèchemalgré la blessure du général Hanco*ck, mis hors de combat. Enquelques minutes, les éléments restants de la brigade d’Armisteadsont anéantis et le général lui-même est mortellement blessé.L’assaut d’infanterie a duré moins d’une heure et coûté auxconfédérés environ 6500 hommes dont plus de 1000 tués, les pertesde l’Union ne s’élevant qu’à 1500 hommes.
L’assaut d’Ewell
La charge de Pickett n’a pas étéle seul engagement du troisième jour de la bataille de Gettysburg.Durant une large partie de la journée, les troupes d’Ewell ontaussi tenté de reprendre le contrôle de Culp Hill à l’extrémiténord-est du champ de bataille, à nouveau sans succès. C’esttoutefois son échec qui brise définitivement les espoirs devictoire du Sud, non seulement à Gettysburg, mais enPennsylvanie.
Les suites de labataille
En trois jours, le généralLee a perdu entre 23000 et 30000 hommes sur environ70000. Il n’a plus aucune force disponible pourtenter une nouvelle offensive et se voit contraint de se replier.Immédiatement après l’échec de la charge de Pickett, Trimble etPettigrew, le général Longstreet s’est avancé avec son État-majorpour rallier les hommes et les préparer à une contre-attaque del’Union. Celle-ci ne viendra jamais.
En effet, le général Meade a luiaussi perdu plus de 20000 hommes au cours de la bataille etson armée est dangereusem*nt affaiblie. Trois de ses chefs decorps, Reynolds, Sickles et Hanco*ck, ont été mis hors de combat.Cela explique l’apparent manque de mordant du général au cours dela poursuite de l’armée de Lee dans les jours suivants.
Si les Confédérés peuvent sereplier en bon ordre, ils ne pourront plus lancerd’offensive majeure dans le Nord. Dans le même temps, àl’Ouest, le général Grant a pris Vicksburg tandis que le généralnordiste William Rosecrans, à la tête de l’armée du Cumberland, aenvahi la majeure partie du Tennessee suite à la campagne deTullahoma.
La guerre sembledéfinitivement basculer du côté de l’Union.
Le discours de Gettysburg: 19 novembre 1863
Le président Abraham Lincoln semontre rapidement déçu de l’absence d’exploitation de la victoirede Gettysburg. Il estime en effet que l’armée fédérale a manqué uneoccasion unique d’anéantir la principale force confédérée. Pourautant, et malgré les lourdes pertes, la bataille s’estsoldée par une victoire sans appel de l’Union.
Le 19 novembre1863, Lincoln se rend à Gettysburg afin de commémorer cesuccès. Il y prononce un discours mémorable (The GettysburgAddress), l’un des plus célèbres de l’histoiredes États-Unis, sur le républicanisme américain et la nécessité delutter jusqu’au bout afin de défendre les libertés garanties par laConstitution américaine. Lincoln rend également hommage aux soldatstués au cours de la Guerre de Sécession.
Le président américain a comprisl’importance majeure de la bataille de Gettysburg, la plusmeurtrière de tout le conflit. Il faudra pourtant encore près dedeux ans de combat pour mettre fin à la rébellion duSud.
Les controverseshistoriques sur la bataille de Gettysburg
Au Nord, la victoire de Gettysburgest d’abord saluée comme un triomphe majeur contre l’armée dugénéral Lee qui avait acquis une réputation d’invincibilité. Pourautant, les lourdes pertes et la relative mollesse de la poursuitede Meade attirent bientôt les critiques.
Meade critiqué etsalué
Elles sont menées par certainsofficiers eux-mêmes, en particulier le généralSickles, dont les décisions désastreuses ont mené le IIIecorps de l’armée fédérale à sa perte. Le général, qui a perdu unejambe au cours des combats, n’aura de cesse de souligner son rôlelors de la bataille, tout en accusant son supérieur Meade de manquede courage. Selon lui, le général en chef de l’armée du Potomacaurait souhaité se replier du champ de bataille mais en aurait étéempêché par ses subordonnés.
À l’inverse, des héros de lavictoire tels que Hanco*ck, Gibbon ou le gouverneur Warren estimentque Meade a commandé son armée d’une main demaître, bien qu’il ait été nommé à sa tête moins d’unesemaine auparavant. Si Meade, restera commandant en chef de l’arméedu Potomac jusqu’à la fin de la guerre, à partir de 1864, ilopérera sous la supervision directe du général Grant, nommé généralen chef des forces armées américaines.
Lee et Longstreetcritiqués
Gettysburg a encore davantageprêté à controverse dans le camp confédéré. Après la bataille, legénéral Lee a pleinement assumé la responsabilité de ce graveéchec. Pour autant, afin de l’exonérer de tout blâme, de nombreuxvétérans confédérés, en particulier le général Jubal Early (quicommandait une division du corps d’Ewell), pointeront les erreursde ses subordonnés. JEB Stuart aurait ainsi privé son armée dereconnaissance en menant un raid inutile vers le Nord, A.P Hillaurait commis l’erreur d’engager le combat le premier jour malgréles ordres de Lee tandis que Richard Ewell a privé les sudistesd’une position avantageuse en n’attaquant pas Cemetery Hill ce mêmejour.
Toutefois, c’est la performance dugénéral Longstreet qui a le plus été critiqué. Selon les tenants dela «lost cause», le commandant du Ier corps de l’arméede Virginie du Nord aurait désobéit à Lee en n’attaquant qu’à 16heures le 2 juillet, laissant le temps à ses ennemis de renforcerleurs positions. Le général aurait également manqué de mordant unefois l’assaut lancé, et le lendemain lors de la charge dePickett.
Ces critiques doivent secomprendre dans le contexte particulier de la reconstruction aprèsla guerre de Sécession. Longstreet, un ami de longue date dugénéral Grant, décide rapidement d’intégrer le parti républicain etse voit investi de hautes responsabilités par le gouvernementfédéral au grand dam de nombreux anciens officiers confédérésn’ayant jamais pleinement accepté la défaite. En outre, au coursdes trois jours de la bataille, Longstreet s’est fréquemment opposéau général Lee sur la stratégie à adopter et la conduite desopérations. Il aurait ainsi préféré lancer un grand mouvementtournant afin de se positionner entre l’armée du Potomac etWashington et forcer les forces de l’Union à passer à l’offensive.Longstreet a également averti son supérieur du danger de l’assautde Pickett le 3 juillet.
Lee, principal responsable de la défaiteà Gettysburg
En définitive, si ses subordonnésont pu commettre des erreurs, Lee demeure le principalresponsable de la défaite de Gettysburg dans le campconfédéré. Doté d’un Etat-major sous-dimensionné, aucontraire de Longstreet et de Jackson avant sa mort, le commandanten chef confédéré était contraint de laisser une large partd’initiative à ses chefs de corps. Ce mode de fonctionnement a puêtre problématique en juillet 1863 alors que deux généraux dedivision, Ewell et Hill, venaient d’être nommés à ce rang. Lee nesemble par ailleurs pas s’être opposé à ce que Longstreet retardeson assaut, au deuxième jour de la bataille de Gettysburg. Ladécision de lancer la désastreuse charge de Pickett fut égalementprise par le général en chef lui-même contre l’avis de sonprincipal lieutenant.
Bibliographie sur la bataille deGettysburg
Jeffrey Hall, The stand of the US army atGettysburg
Mark AdKin, The Gettysburg Companion
Michael Shaara, The Killer Angels
Vincent Bernard, Robert Lee
James McPherson, La Guerre de Sécession, 1861-1865